Remise en cause de l'indépendance et l'impartialité du ministère public

Par un arrêt du 18 janvier 2011 (n°10-84.980), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a apporté une contribution décisive au débat relatif au statut du ministère public.

Reprenant une position élaborée avec timidité dans une décision en date du 15 décembre 2010 (n°10-83674), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a cette fois précisé, sans détour, que « le ministère public, ne présentant pas les garanties d’indépendance et d’impartialité et étant partie poursuivante, n’est pas une autorité judiciaire au sens de l’article 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme ».

Cette décision constitue un apport décisif vers une réforme ambitieuse du statut du ministère public, dans la mesure où elle ne se contente de nier au ministère public le caractère d’autorité judiciaire sur le seul fondement de son manque d’indépendance. Elle y ajoute un autre critère tenant au fait que son impartialité est conditionnée par sa qualité de partie poursuivante.

De manière implicite, c’est tout le débat du rôle du ministère public dans la procédure pénale qui est ainsi posé : autorité de poursuite, le ministère public ne peut pas, en vertu du principe d’impartialité, continuer à décider de mesures attentatoires aux libertés individuelles telles que les gardes à vue.

En cela, la Chambre criminelle de la Cour de cassation s’inspire directement de la décision de la Cour européenne des droits de l’Homme dans l’affaire Medvedyev en date du 29 mars 2010, aux termes de laquelle les contrôles juridictionnels des mesures attentatoires à la liberté individuelle « doivent être automatiques et effectués par un magistrat présentant des garanties d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties et ayant la possibilité d’ordonner la mise en liberté après avoir examiné le bien fondé de la détention ».

CEDH, Medvedyev contre France, 29 mars 2010 :
http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?action=html&documentId=865671&portal=hbkm&source=externalbydocnumber&tabl

Cass. crim. 18 janvier 2011, n°10-84.980 :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000023494706&fastReqId=839249692&fastPos=1